- GDS Creuse - http://www.gdscreuse.fr -

Le botulisme chez les bovins – 18 août 2021

Le botulisme chez les bovins
Une pathologie encore méconnue

 

Botulisme => Le botulisme est une pathologie neurologique, le plus souvent d’origine alimentaire, provoquée par des toxines produites par Clostridium botulinum. L’évolution clinique des animaux atteints est presque toujours fatale.

Un rapport de l’Agence Nationale Sécurité Sanitaire Alimentaire Nationale (ANSES) vient d’être publié pour faire le point sur les connaissances sur cette pathologie encore méconnue des éleveurs.

Un agent responsable de la grande famille des clostridies

La maladie a été décrite dès le 18ème siècle et la bactérie responsable a été identifiée à la fin du 19ème siècle. Les bactéries Clostridium botulinum constituent un ensemble de souches dont la particularité est de produire une neurotoxine, la toxine botulinique. Elles sont classées en 9 types, en fonction de la toxine produite (de A à H et X), les souches C et D et plus particulièrement la souche D/c étant les plus fréquemment rencontrées lors d’épisodes cliniques sur les bovins (88 % des cas). Le botulisme est une zoonose mais les souches retrouvées chez l’homme sont très majoritairement différentes de celles rencontrées chez les bovins. Comme toutes les clostridies, ces bactéries apprécient les milieux anaérobies (sans oxygène) et ont la capacité de sporuler, notamment dans les cadavres d’animaux. Les spores ont une très grande résistance dans le milieu extérieur, parfois plusieurs milliers d’années.

Cycle de C. botulinum dans un écosystème d’eau douce (Espelund et Klaveness 2014)
Trois compartiments interviennent dans la persistance et la croissance de C. botulinum : l’environnement, un compartiment biotique intermédiaire et des vertébrés. Le recyclage se fait principalement par les cadavres, avec une amplification par les asticots.

Une grande distribution dans l’environnement

botulinum est naturellement présent dans l’environnement, plus particulièrement dans les sédiments des zones humides. La germination des spores va dépendre de nombreux facteurs : température, hygrométrie, pH, teneur en oxygène, présence de matière organique… En contexte de canicule, on a une hausse de la température associée à une baisse de l’oxygénation de l’eau particulièrement favorables au développement de la forme végétative de la bactérie. Elle va alors coloniser le milieu, infectant les algues, les invertébrés aquatiques ou l’intestin des poissons et des oiseaux. Ceux-ci peuvent alors développer de la clinique, en fonction de leur sensibilité à la maladie et de la charge bactérienne.

Une contamination rare mais préoccupante

Les épisodes cliniques observés chez les bovins sont le plus souvent liés à l’abreuvement avec une eau de surface, l’accès à une pâture ou la distribution d’aliments contaminés par des cadavres d’animaux. Bien que rares (une dizaine de foyers annuels confirmés en France mais tous les cas ne sont probablement pas déclarés), ces épisodes cliniques sont préoccupants du fait de la persistance de la bactérie dans l’environnement et de la possible dispersion de spores par épandage des lisiers ou des fumiers, surtout de volailles (risque lié aux excréments amplifié par la présence de cadavres). On observe également un portage sain sur certains animaux qui sont susceptibles de recontaminer le milieu à tout moment.

Animaux touchés (CNR/LNR)
Si le botulisme peut toucher tous les animaux, les oiseaux et les bovins sont les plus touchés. 592 cas ont été confirmés entre 2009 et 2019 en France mais les chiffres sont probablement sous-évalués, tous les foyers ne faisant pas l’objet d’une confirmation par le Laboratoire National de Référence.

L’intoxination, source principale de contamination

Les bovins se contaminent principalement par l’ingestion directe de la toxine botulinique, à laquelle ils sont extrêmement sensibles ; on estime qu’un gramme de toxine pure pourrait provoquer la mort de 400.000 bovins adultes ! Les cas les plus graves sont d’ailleurs rencontrés dans les exploitations utilisant une mélangeuse, qui favorise une large diffusion de la toxine dans la ration distribuée. La neurotoxine va se diffuser et va bloquer l’influx nerveux, entrainant une paralysie, le plus souvent ascendante, des postérieurs vers la tête, sans hyperthermie.

Un tableau clinique marqué par la paralysie flasque

La période d’incubation peut varier de quelques heures à quelques semaines, en fonction de la sensibilité de l’animal et de la dose ingérée. On retrouve cette variabilité dans les formes cliniques. Lors de forme suraiguë, on observe la mort en quelques heures. Dans la forme classique, on observe une chute brutale de la production de lait, des difficultés locomotrices, une dysphagie avec une langue pendante et des troubles digestifs. Les animaux sont mous et on parle de paralysie flasque. La clinique évolue vers un décubitus sterno-abdominal, la tête en auto-auscultation et la mort intervient en deux à trois jours par asphyxie ou fausse déglutition. Dans le cas de formes subaiguës, on observe le même tableau clinique avec une forme atténuée et parfois l’évolution est favorable avec une guérison en quelques semaines. Au sein d’un élevage, on constate souvent un épisode clinique en deux phases, avec des animaux présentant une forme aiguë et une forte mortalité, suivi quelques jours plus tard d’animaux avec des signes cliniques plus atténués.

Un diagnostic analytique parfois compliqué

Le diagnostic clinique peut être compliqué en début d’évolution et si un petit nombre d’animaux est concerné. Il faut exclure les causes traumatiques, les hypocalcémies, les intoxications ou des maladies comme la listériose. Une confirmation peut se faire au laboratoire par mise en culture ou analyse PCR de prélèvements effectués sur les fèces, le contenu digestif ou un organe interne comme le foie, voire un aliment suspect. Enfin, le typage de la souche pourra être fait par le Laboratoire National de Référence (LNR) de Ploufragan. Au niveau sanguin, on ne trouve souvent plus de toxine sur le sérum des animaux en phase clinique, celle-ci n’étant probablement déjà plus circulante.

Aspects réglementaires en santé animale en France

Le botulisme est réglementé en France depuis 2006 sur les oiseaux sauvages et les bovins et la réglementation a été renforcée en 2013 avec déclaration obligatoire auprès de la DDPP pour toutes les espèces animales. Il ne figure pas en revanche dans les 63 maladies listées dans le cadre de la LSA, l’évolution de son statut réglementaire reste à définir. Pour les éleveurs adhérents, les pertes animales, qui peuvent être considérables, sont prises en charge dans le cadre du Fonds de Mutualisation Sanitaire et Environnemental (FMSE).

Pas de traitement efficace mais un vaccin disponible sous ATU

Il n’existe aucun traitement curatif chez les ruminants. Dans les foyers, un vaccin sous Autorisation Temporaire d’Utilisation (ATU) est disponible pour l’immunisation des bovins et des ovins contre le botulisme C et D (Ultravac Botulinum ND). Son utilisation reste conditionnée à l’autorisation de l’Agence Nationale du Médicament Vétérinaire (ANMV) et l’effet protecteur ne s’installe qu’un mois après la vaccination. La prévention passera donc principalement par les mesures environnementales : accès à une eau de qualité, vigilance sur l’épandage des fumiers, s’assurer de l’absence de cadavre dans les fourrages, notamment l’ensilage, lutte contre les rongeurs. Pour toute information complémentaire, n’hésitez pas à contacter votre vétérinaire ou nos services.

Dr Boris BOUBET
GDS Creuse