Coccidiose chez les ovins – 21 février 2024

Coccidiose chez les ovins
Une problématique majeure sur les agneaux

 

Coccidiose de l’agneau : Les coccidies sont présentes chez de nombreuses espèces avec une capacité de parasiter massivement leurs hôtes, entraînant le plus souvent des atteintes chroniques (pertes de croissance) et parfois l’apparition de signes cliniques pouvant conduire à la mort. Leur gestion passe par la mise en place de mesures sanitaires et médicales.

On estime que les coccidies sont présentes dans 80 à 90 % des élevages ovins. Les parasites sont surtout pathogènes chez les jeunes avec une apparition de la maladie lors d’exposition à un nombre important d’ookystes ou à une perturbation du système immunitaire.

Des parasites spécifiques de chaque espèce

Il existe une spécificité d’hôte très stricte chez les coccidies qui interdit tout échange de parasites entre les différentes espèces de ruminants ou avec d’autres animaux. Douze espèces différentes d’Eimeria ont été décrites chez le mouton dont deux (Eimeria ovinoidalis et Eimeria crandallis) sont considérées comme pathogènes par atteinte de l’intestin grêle et du gros intestin. Quelle que soit l’espèce, le cycle est direct et se déroule dans l’intestin. L’ookyste est très résistant dans le milieu extérieur (deux à cinq mois). La durée de maturation (sporulation) nécessaire pour qu’il devienne infectant varie suivant la température : plusieurs semaines en dessous de 10°C, 3 à 5 jours entre 15 à 25 °C. Les agneaux se contaminent en léchant la litière ou en s’abreuvant à un point d’eau contaminé. Dans l’intestin, chaque ookyste sporulé donne naissance à des éléments qui vont pénétrer dans les cellules, s’y multiplier et les détruire (cf. cycle des coccidies). Cela permet la libération de millions de nouveaux ookystes 2 à 3 semaines plus tard qui vont être excrétés dans les fèces pendant 5 à 10 jours maximum. Au-delà, l’immunité se met en place et lors de réinfestation, la production d’ookystes est limitée et l’excrétion dure 2 à 3 jours.

Source: Chambre agriculture Creuse

Un diagnostic qui s’appuie sur la clinique et les coproscopies

Les anticorps colostraux confèrent une immunité passive à l’agneau pendant les 2 à 4 premières semaines de vie. La coccidiose est généralement observée de 3 à 8 semaines d’âge, avec un pic d’incidence aux environs de 6 semaines ; en dehors de cette période, l’apparition de la coccidiose dépend des situations de stress et de l’état immunitaire. Le diagnostic peut être difficile notamment pour la forme chronique. La première indication est l’observation d’agneaux à croissance anormale ; ils peuvent être voûtés ou prostrés et présenter, pour certains, une croupe souillée par les fèces diarrhéiques. En cas de doute ou avant la mise en place d’un traitement, le diagnostic coproscopique est indispensable. Un dénombrement des ookystes d’un mélange de fèces issu de 5 à 10 agneaux donnera une indication sur le niveau d’infection (risque au-dessus de 10.000 œufs par gramme). Cet échantillon fécal doit être représentatif d’agneaux du même âge pris au hasard au sein du troupeau (prise en charge de l’analyse à 50 % par GDS Creuse pour ses adhérents). A mesure que la maladie progresse, certains agneaux présentent une diarrhée liquide et profuse, contenant souvent des filets de sang et parfois des lambeaux de muqueuse intestinale et du mucus. Le traitement médical comprendra l’administration d’un anticoccidien et, le plus souvent, d’un antibiotique car à ce stade les surinfections bactériennes sont fréquentes. Dans la majorité des cas, l’infection coccidienne est de courte durée mais avec persistance possible de lésions intestinales entraînant des retards de croissance avec un appétit diminué et une toison sèche et irrégulière.

Un plan de prévention et de lutte à adapter

La gestion de la coccidiose en élevage nécessite des mesures que l’on peut classer en quatre volets :

  • Favoriser et maintenir une bonne immunité. L’acquisition et le maintien d’une bonne immunité passe par la prise colostrale précoce, la gestion du parasitisme (notamment des strongyloïdes), une alimentation suffisante en quantité et qualité et une complémentation en vitamines et oligoéléments, pour la brebis et l’agneau. Une attention toute particulière sera portée aux agneaux doubles ou triples, davantage prédisposés du fait d’une moindre prise de colostrum associée à un niveau nutritionnel inférieur. Les conditions climatiques et froides, les transitions alimentaires non-maîtrisées, le transport, le manque de soins maternels et les manipulations intempestives des agneaux représentent autant de facteurs de stress, perturbateur du système immunitaire.
  • Alloter les agneaux par âge. Les jeunes agneaux sont le facteur principal de multiplication des ookystes et donc de dynamique de contamination du milieu. Il faut les élever par groupe d’âge équivalent n’excédant pas deux semaines et ne pas les mélanger avec des agneaux plus âgés jusqu’à ce qu’ils aient au moins 8 semaines. Au pâturage, on ne fera pas paître des agneaux sur une parcelle précédemment broutée par des agneaux plus âgés ou fumée avec du fumier potentiellement contaminé.
  • Limiter les possibilités de contamination. Une litière humide dans un bâtiment mal ventilé permet une sporulation rapide des ookystes et favorise donc fortement l’accélération du cycle. On veillera à avoir des litières sèches et paillées quotidiennement. Afin de limiter la charge parasitaire du milieu, on peut désinfecter les bâtiments avec un désinfectant actif (Prophyl S, Kriptosept…). GDS Creuse prend en charge 50 % des frais de désinfection pour ses adhérents. Les abreuvoirs et les auges seront surélevés et la densité maitrisée (1,5 à 2 m² par couple brebis/agneau).
  • Mettre en place un traitement préventif ou métaphylactique. Depuis le 28 janvier 2022 et la mise en application du règlement européen « médicaments vétérinaires », les produits anticoccidiens sont classés « antimicrobiens » au même titre que les antibiotiques et leur usage prophylactique est encadré. Il reste possible sur un nombre restreint d’animaux en cas de risque d’infection très élevé. Les molécules les plus utilisées (diclazuril, toltrazuril) bloquent le cycle coccidien et l’excrétion des ookystes pendant quelques semaines. Administré pendant la période à risque maximal, cela permet à l’animal de surmonter la période de décroissance des anticorps d’origine maternelle et à l’immunité de se mettre en place. Une utilisation fréquente et répétée d’antiprotozoaires peut conduire au développement de résistance chez les parasites. Plutôt qu’un usage systématique, il est donc préférable d’effectuer des coproscopies en cas de suspicion et de mettre en place un traitement métaphylactique lorsque le risque de contamination devient trop élevé. Ces éléments sont à définir avec votre vétérinaire dans le protocole de soins. Pour optimiser les résultats, les animaux devraient être traités avant l’apparition des signes cliniques, c’est-à-dire pendant la période pré-patente. En alternative, la phytothérapie et l’acidification de l’eau avec du vinaigre de cidre semblent donner de bons résultats. Le traitement préventif des brebis ne présente aucun intérêt, voire peut être contre-productif. Les coproscopies faites sur des brebis montrent le plus souvent une excrétion permanente avec des niveaux d’excrétion de 12 à 500 œufs par gramme de fèces. Ce faible niveau d’excrétion permet un contact immunisant pour les agneaux.

La coccidiose clinique est un indicateur d’une contamination du milieu importante ou d’une baisse des défenses immunitaires du troupeau. On veillera à garder les agneaux dans un environnement propre et sec, à ne pas mélanger les tranches d’âge et à s’assurer qu’ils ne sont pas parasités et bien alimentés.

La coccidiose clinique, le révélateur d’un défaut d’hygiène ou d’immunité du troupeau

La coccidiose fait partie des maladies d’élevage et l’apparition de clinique est un indicateur d’une contamination du milieu importante ou d’une baisse des défenses immunitaires du troupeau. L’usage des anticoccidiens ne peut résoudre seul le problème. C’est la conduite d’élevage, c’est à dire la mise en place et le suivi de mesures sanitaires, qui permet la maîtrise de l’impact aigu ou chronique de cette maladie sur son cheptel. D’autre part, l’application de ces mesures sanitaires de base permet la limitation d’autres pathologies infectieuses ou parasitaires qui présentent un risque par elles-mêmes et favorisent l’expression clinique et le développement des coccidioses. Pour plus de renseignements, rapprochez-vous de votre vétérinaire traitant ou de nos services.

Dr Boris BOUBET – Marien BATAILLE
GDS Creuse

imprimer cet article imprimer cet article