La teigne chez les ruminants – 17 février 2021

La teigne
Une pathologie contagieuse

La teigne = C’est une affection cutanée provoquée par un champignon. Cette mycose se développe plus particulièrement sur les jeunes bovins, mais aussi parfois sur les vaches laitières ou allaitantes, avec des lésions caractéristiques appelées « dartres ».

C’est une des pathologies cutanées les plus fréquentes chez les ruminants, avec des lésions caractéristiques facilitant son diagnostic visuel.

Une mycose provoquée par un Trycophyton

La teigne est causée par un champignon microscopique, Trichophyton verrucosum. Ce champignon est extrêmement résistant sous forme de spores dans l’environnement, pendant plusieurs mois, voire plusieurs années, ce qui explique la transmission des cas de teigne sur les générations de veaux qui se succèdent d’année en année dans un élevage. La teigne peut toucher les bovins, les chevaux, les chèvres, les moutons et les chiens.

Une pathologie très contagieuse et une zoonose

La transmission du champignon se fait essentiellement par contact direct, d’un animal sain avec un animal contaminé mais aussi de façon indirecte, quand un animal sain est en contact avec un environnement contaminé (auge, cornadis, murs et clôtures, matériel de pansage…). Elle se transmet entre les différentes catégories d’animaux d’une même exploitation agricole (les animaux les plus âgés contaminant souvent les plus jeunes…) et en cas d’achat de bovins, d’expositions, de concours… Mais les animaux peuvent également transmettre la teigne à l’Homme. Chez celui-ci, la teigne se manifeste par des lésions caractéristiques, inflammatoires et souvent suppuratives au niveau des mains, des bras, du visage et de la chevelure. Les personnes les plus fréquemment atteintes sont les enfants, les éleveurs, les professionnels de l’élevage (inséminateurs, vétérinaires, marchands de bestiaux, personnel d’abattoir…).

Une maladie du confinement et de l’humidité

Plusieurs facteurs conditionnent l’apparition de la clinique et tous les animaux mis en contact avec Trichophyton ne vont pas développer la maladie. Les lésions apparaissent en présence de facteurs favorisants : jeune âge (les animaux de moins d’un an sont les plus concernés), déficience immunitaire, environnement inadéquat (confinement, mauvaise ventilation, humidité importante, mauvaise hygiène…), carence alimentaire, autre maladie concomitante… Enfin, la teigne est plus fréquente à l’automne et en hiver, surtout chez des animaux confinés à l’intérieur.

Les dartres, des lésions caractéristiques

Les lésions de la teigne apparaissent 1 à 6 semaines après le contact avec le champignon. Des dépilations arrondies apparaissent sur la tête puis gagnent l’ensemble du corps. D’abord sèches et blanc grisâtre, d’aspect farineux, les lésions (appelées dartres chez les animaux ou herpès circiné chez l’homme) s’épaississent et prennent un aspect croûteux ou verruqueux. Elles ne sont ni prurigineuses, ni douloureuses chez l’animal. Elles sont le plus souvent suffisamment caractéristiques pour permettre le diagnostic mais la confirmation peut se faire par un prélèvement de poils au niveau d’une dartre et l’observation du champignon au microscope. Elles se multiplient pendant 1 à 2 mois, puis régressent spontanément en 1 à 4 mois. Si les lésions perdurent au-delà de ce délai ou ont tendance à récidiver, il faut alors remettre en cause la qualité de l’environnement et/ou suspecter un déficit immunitaire chez les animaux.

(Source photos Tanneries Haas)
Les lésions de teigne sont relativement caractéristiques, en tout cas en début d’évolution. On observe des dépilations circulaires (on parle de lésion nummulaire), non prurigineuses et assez rapidement extensives. L’évolution se fait vers la guérison spontanée, notamment en présence de lumière, mais un traitement peut s’avérer nécessaire, sur les formes surinfectées par exemple.

Des conséquences économiques majeures

La teigne n’est pas une maladie très grave dans la mesure où elle n’entraîne pas la mort des animaux, mais elle peut être responsable de retards de croissance chez les veaux de boucherie ou d’élevage, de baisses de la production laitière et de dégradation de la qualité des cuirs due aux cicatrices lors de leur valorisation dans l’industrie de la tannerie (la perte potentielle de la valeur des cuirs est estimée à 6 à 8%). Elle peut également affecter les échanges commerciaux (notamment lors de vente à l’exportation de broutards, de génisses laitières ou de vaches en lactation) et le commerce de jeunes veaux mâles (notamment pour leur achat par des sociétés de sélection génétique, ou encore de taureaux reproducteurs).

Des mesures énergiques sur les animaux …

En cas de déclenchement de la maladie, il faut isoler les animaux porteurs de lésion et, si le temps le permet, les mettre en extérieur, au soleil. Les lésions guérissent habituellement spontanément après quelques mois. Le traitement, s’il est instauré, vise à accélérer la guérison et à limiter la contamination d’autres animaux. Si les lésions sont peu nombreuses, on peut appliquer un fongicide jusqu’à guérison après avoir brossé les plaques : moins il y a de croûte, mieux le produit pénètre. Si les lésions sont importantes, il est également possible d’asperger les bovins en veillant à ce que le produit entre bien en contact avec les lésions. L’application d’un fongicide liquide nécessite certaines mesures de précaution : port d’un masque et de gants avant de traiter. L’application d’huile ou de graisse sur les lésions peut empêcher la prolifération des champignons en les privant d’oxygène mais évitez, comme cela se fait parfois, l’application d’huile de vidange : cette méthode peut se révéler toxique pour le bovin et ses productions (veaux, lait, viande…).

… et l’environnement

La teigne est très difficile à faire disparaître d’un élevage pour deux raisons : les spores du champignon peuvent persister pendant des années dans le milieu environnant et les animaux peuvent être porteurs de la maladie sans développer de symptômes. Après un épisode clinique, il faudra nettoyer et désinfecter les locaux d’élevage (niches individuelles, nurseries, bâtiments pour les génisses sevrées…) par pulvérisation ou par fumigation afin de détruire les spores, en vérifiant l’action fongicide du produit choisi. Insister particulièrement sur les auges, les cornadis, les sols, murs et litière, les poteaux et tubulures, les licols, les bétaillères, mais aussi les vêtements, les bottes…

 

 

Plusieurs axes de prévention

Pour éviter l’introduction de la maladie, il faut mettre en quarantaine tous les animaux entrant dans l’exploitation (animaux nouvellement acquis ou animaux de l’exploitation revenant d’une foire ou d’une exposition où ils auraient pu être en contact avec des animaux malades). En cas de problème récurrent, et notamment en production de veau sous la mère, une vaccination avec un vaccin vivant atténué peut être conseillée (2 injections espacées de 10 à 14 jours par voie intramusculaire). Cette vaccination est particulièrement efficace et ne nécessite pas de rappels annuels si l’ensemble du troupeau a été correctement immunisé la première année ; seuls les veaux nouveau-nés ou les animaux nouvellement acquis seront vaccinés selon le même protocole. Mais elle doit s’accompagner de mesures sanitaires, sur l’ambiance du bâtiment (chargement et gestion de l’humidité), la désinfection des matériels et l’alimentation. La vitamine A en particulier peut aider à la prévention de la teigne car elle joue un rôle au niveau du développement des cellules de la peau qui forment une barrière protectrice. D’autres éléments interviennent, comme le magnésium ou le zinc, disponibles en bolus.

Un épisode clinique souvent signe d’alerte pour l’élevage

L’apparition de dartres dans son cheptel doit amener l’éleveur à se poser des questions sur l’immunité des animaux, leur logement et leur alimentation (cf. Ilustration). C’est un axe majeur de notre action dans le cadre de notre concept « Le sanitaire… j’adhère ! ». Pour plus de renseignements, n’hésitez pas à contacter votre vétérinaire ou nos services.

Dr Boris BOUBET – GDS Creuse

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