CGAAER – 5 idées reçues – 02 janvier 2015

CGAAER : agriculture, alimentation et forêt CGAAER
Argumenter face aux slogans et faux jugements que le monde agricole subit

Idées reçues => Comme chaque début d’année, je vous propose un article plus général qui dépasse notre simple cadre sanitaire. Il porte sur des idées reçues relatives à notre agriculture qu’il me semble primordial de contrecarrer.

En 2014, le CGAAER (Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux) a publié une « controverse documentée à propos de quelques idées reçues sur l’agriculture, l’alimentation et la forêt » en cinq épisodes.

Des idées reçues débattues en 5 épisodes

Dans son introduction, le CGAAER nous indique : « « En politique, ce qui est cru est plus important que ce qui est vrai » disait Talleyrand. Pour autant, il n’est pas interdit, face à des « idées reçues », de proposer des observations et des points de vue documentés qui confirment, atténuent ou infirment ces idées reçues. Cet exercice est ambitieux et salutaire parce qu’il tend à s’approcher de la vérité. Il est cependant relatif car il dépend des informations disponibles au moment où il est réalisé. Mais surtout, il a paru utile parce qu’on ne construit pas durablement sur des slogans et des faux jugements et parce qu’un débat ouvert est toujours préférable à l’absence de débats ». Sont présentées dans cet article les principales conclusions du CGAAER pour chaque idée reçue.

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Nous disposons des techniques et des ressources naturelles nécessaires pour nourrir 9,5 milliards de personnes en 2050

Pour l’idée reçue n°1 : « Nous ne pourrons pas nourrir 9,5 milliards de personnes en 2050 », le CGAAER indique : « Nous disposons des techniques et des ressources naturelles nécessaires pour nourrir 9,5 milliards de personnes en 2050. Soit trois milliards de plus qu’aujourd’hui : le milliard qui ne mange pas à sa faim actuellement et les deux milliards supplémentaires liés à l’évolution démographique… Des progrès considérables sont encore possibles en matière de rendements, en particulier dans les pays en développement. Nous disposons aussi de suffisamment de terres pour étendre en tant que de besoin les surfaces cultivées, sans porter atteinte aux ressources forestières. Nous disposons aussi de suffisamment d’eau globalement. Elle devra être mieux gérée… Cependant, l’inégale répartition de la ressource en eau et le décalage croissant entre les régions à forte croissance démographique et leurs potentiels agricoles est susceptible de renforcer les phénomènes migratoires et le rôle des marchés mondiaux dans l’ajustement de l’offre et des besoins alimentaires… Le recours aux OGM ne peut être exclu a priori, dès lors qu’ils pourront lever des blocages techniques actuels aux cultures ou améliorer la qualité nutritionnelle de certaines productions. Au-delà du débat sur la capacité à produire la nourriture nécessaire pour faire face aux besoins alimentaires de notre planète en 2050, moment où la population mondiale devrait se stabiliser, la lutte contre la pauvreté demeurera un élément essentiel pour combattre la faim dans le monde »…

Les dépenses agricoles représentent moins de 1 % des dépenses de l’Europe et de ses Etats, la PAC associe performances économique et environnementale

Face à l’idée reçue n°2 : « La PAC coûte trop cher et doit tourner le dos au productivisme », le CGAAER argumente ainsi : « La politique agricole commune profite aux agriculteurs et aux consommateurs. Elle concerne plus de 40 % de la surface de notre pays. Les dépenses agricoles de l’Union européenne et de ses États membres représentent moins de 1 % de leurs dépenses publiques, tous secteurs confondus pour un secteur économique qui représente 3 % du PIB européen. Ces crédits permettent d’avoir une agriculture européenne performante parmi les leaders mondiaux. Ils sont aussi le garant de la sécurité alimentaire européenne et contribuent au développement de nos territoires ruraux. Au fil de quarante années de profondes réformes souvent méconnues, la PAC s’est adaptée aux nouvelles règles du commerce international et aux exigences environnementales de nos sociétés. Elle va continuer de s’adapter et nombre des procès qui lui étaient faits sont beaucoup moins fondés aujourd’hui. La PAC est aujourd’hui plus équilibrée parce qu’elle associe mieux performance économique et performance environnementale et aussi parce que les aides de la PAC sont plus équitablement réparties avec une meilleure prise en compte des critères sociaux et des équilibres entre régions »…

Chez les agriculteurs, une réelle prise de conscience que performance économique et performance écologique sont liées

Par rapport à l’idée reçue n°3 : « Les agriculteurs portent atteinte à l’environnement », le CGAAER explique : « Il y a quelques décennies, au sortir de la guerre, l’agriculture répondait à la demande sociale de l’époque : assurer en priorité une production suffisante. Certaines pratiques agricoles ont porté atteinte à l’environnement. Mais ces atteintes sont rarement irréversibles sous nos climats tempérés et on observe une réelle prise de conscience parmi les agriculteurs que performance économique et performance écologique sont liées. Les milieux naturels présentent cependant une grande inertie et les progrès s’inscriront dans le long terme. L’évolution des pratiques qui est engagée ainsi que les nouvelles dynamiques politiques, de recherche et de développement conduiront à rendre de moins en moins fondée l’idée reçue de l’agriculture destructrice de l’environnement »…

Une gestion forestière durable

L’idée reçue n°4 : « Les forêts disparaissent, elles sont trop exploitées » est abordée comme suit par le CGAAER : « La forêt française n’est pas en danger. Avec une croissance moyenne de 50.000 hectares chaque année pendant ces dernières décennies, elle a retrouvé sa superficie du XIVème siècle… La gestion forestière répond à des demandes diverses tant patrimoniales que sociales ou économiques. C’est une gestion « durable » depuis bien longtemps. Celle-ci n’empêche pas l’économie du bois d’être à la fois pourvoyeuse de nombreux emplois, innovante dans les usages du bois et appréciée des « designers ». La forêt est moderne parce que sa gestion est durable et ses produits innovants »…

On mange mieux aujourd’hui

L’idée reçue n°5 : « On mangeait mieux avant » très répandue est particulièrement erronée comme nous le montre le CGAAER : « Ce que nous mangeons est un produit de la terre ou de la mer, transformé ou non. C’est un produit biologique pour lequel le « risque 0 » n’existe pas. Mais, en dépit de la transformation croissante des produits, de la diversification des modes de consommation et de la mondialisation du marché de l’alimentation, on mange mieux aujourd’hui… Les dispositifs de contrôle sanitaire sont de plus en plus performants. Il ne faut pas confondre les « crises sanitaires » avec les « crises alimentaires de confiance » qui relèvent le plus souvent de fraudes sans conséquences sanitaires mais qui bénéficient des mêmes élans médiatiques. Pour satisfaire les demandes du consommateur au regard de la proximité de la production et de la qualité des produits, se développent les « circuits courts » d’approvisionnement… Ils ne sont pas une garantie automatique de qualité… L’agriculture biologique est aussi une réponse à une demande des consommateurs pour plus d’authenticité, pour « mieux manger » et pour protéger l’environnement. Si elle garantit la non-utilisation de produits chimiques de synthèse et l’absence d’OGM, elle n’est cependant pas, en tant que tel, une garantie de qualité. Elle peut contribuer au « manger mieux » et trouver sa place au côté de l’agriculture conventionnelle pour satisfaire les besoins de tous les consommateurs. Au-delà, qu’il s’agisse de la consommation de viande ou du gaspillage alimentaire, par exemple, le bon sens et la responsabilité de chacun doit permettre d’améliorer les comportements en conservant à l’alimentation sa fonction nutritive, culturelle et, autant que possible, de plaisir ».

« Agriculture, alimentation, environnement et santé humaine, les agriculteurs doivent reprendre la parole », des lectures incontournables

Dans l’article du 13 janvier 2012, « Agriculture, alimentation, environnement et santé humaine. Les agriculteurs doivent reprendre la parole », je vous indiquai : « Agriculture, alimentation, environnement et santé humaine constituent des sujets pleinement d’actualité plus ou moins biens compris par le « citoyen-consommateur » d’où l’implication nécessaire des « gens du métier » ». Cette réflexion s’avère encore plus d’actualité aujourd’hui. La lecture de ces controverses fournies par le CGAAER constitue un passage incontournable par toute personne souhaitant argumenter rationnellement face aux slogans et faux jugements que le monde agricole subit. Vous les trouverez sur http://agriculture.gouv.fr/le-conseil-general ou en suivant les liens suivants :
• Idée reçue n°1 : « Nous ne pourrons pas nourrir 9,5 milliards de personnes en 2050 »
• Idée reçue n°2 : « La PAC coûte trop cher et doit tourner le dos au productivisme »
• Idée reçue n°3 : « Les agriculteurs portent atteinte à l’environnement »
• Idée reçue n°4 : « Les forêts disparaissent, elles sont trop exploitées »
• Idée reçue n°5 : « On mangeait mieux avant »

Avec tous mes vœux pour cette nouvelle année.

Dr Didier GUERIN – GDS Creuse