La filière broutard – Préparons-les ! 29 janvier 2020

La filière broutard
Une production stratégique avec des enjeux sanitaires

La production de broutards => C’est une caractéristique de l’élevage allaitant, tout spécialement en France. Ces animaux, majoritairement exportés, dépendent donc des exigences sanitaires des acheteurs.

 La France, principal cheptel allaitant d’Europe

90.000 exploitations agricoles (> 5 vaches allaitantes), produisent 3.600.000 veaux par an. Un quart reste en renouvellement, principalement des femelles, un quart est engraissé dans l’élevage d’origine sous forme de veau de lait, génisses de boucherie, taurillons ou bœufs et la moitié est commercialisée sous forme broutard. Le broutard est un veau mâle ou femelle, né d’une vache allaitante avec laquelle il reste jusqu’au sevrage, nourri surtout au lait et à l’herbe jusqu’à son départ vers un atelier d’engraissement. 40 % d’entre eux sont engraissés en France, les autres sont exportés, principalement vers l’Italie pour les mâles (demande du marché italien en taurillons) et l’Espagne pour les femelles. La région Nouvelle-Aquitaine est la première exportatrice de broutards en France.

Une concurrence internationale qui se développe

Les broutards français, issus de vaches de nos races allaitantes (charolaise, limousine, blonde d’Aquitaine…), sont reconnus pour leur conformation, leur développement musculosquelettique et leur aptitude à valoriser les rations. La concurrence européenne, historiquement faible du fait d’un manque de qualité intrinsèque des animaux, se renforce depuis quelques années par le croisement de races locales avec des géniteurs français ou la conversion complète d’élevages à nos races, notamment dans les pays de l’Est. Plus récemment, l’anticipation du Brexit par les engraisseurs anglais qui ont fermé leurs frontières aux broutards irlandais vient encore perturber ce marché.

Des exigences sanitaires multiples, BVD, l’intérêt de la garantie non-IPI

La vente à l’international et la dépendance du marché à peu de pays acheteurs rend vulnérable les vendeurs. L’apparition de la fièvre catarrhale ovine sérotype 8 en 2007-2008 avait entrainé une crise majeure. Sa résurgence en 2015 et l’apparition du sérotype 4 en 2017 ont de nouveau fortement perturbé les échanges. Certains marchés se sont complètement fermés et, pour les autres, tous les animaux exportés doivent être vaccinés pour cette maladie. La circulation du virus BVD dans nos cheptels et la commercialisation d’IPI qui s’ensuit provoque une surmortalité liée à la baisse des défenses immunitaires en ateliers d’engraissement. L’impact économique pour les opérateurs commerciaux, chez lesquels se répercutent ces pertes, augmente d’année en année. En conséquence, des exigences de garantie BVD se renforcent pour certains marchés. Le dépistage BVD de tous les veaux à la naissance avec la boucle d’identification préleveuse de cartilage à partir du 01/10/2020 avec la garantie non-IPI liée va permettre aux éleveurs creusois de répondre à cette problématique.

Une problématique majeure de pathologies respiratoires

L’allotement de bovins issus de nombreux cheptels dans un même bâtiment conduit à un brassage de virus et de bactéries qui entraîne inévitablement des problèmes. C’est particulièrement vrai pour les pathologies pulmonaires. Le taux d’animaux malades varie de 5 à 30 % et la mortalité peut atteindre 2 %. Plusieurs facteurs de risque accentuent cette dynamique : broutards sevrés jeunes, exportés dès le sevrage, ayant transité par de nombreux centres de rassemblement ou peu habitués à une alimentation de ruminant. Les 3 premières semaines d’allotement constituent la période critique, surtout si la météo est humide et nos animaux de race pure semblent plus sensibles à ces problèmes.

 

 

De nécessaires évolutions dans un contexte d’antibiorésistance

La gestion de ces maladies multifactorielles passe souvent par l’emploi d’antibiotiques en traitement de ces maladies, voire en métaphylaxie ou en prophylaxie. Ce schéma atteint ses limites du fait du rôle accru de certaines bactéries comme Mycoplasma bovis, d’une augmentation des résistances aux antibiotiques et d’une évolution de la législation qui restreint leur usage (plans Ecoantibio 1 et 2) et qui va encore se durcir. L’amélioration des conditions d’ambiance et de l’hygiène du bâtiment, axe majeur de gestion pour les engraisseurs, même bien mené, ne suffit souvent plus. Le recours à la vaccination, pour obtenir de bons résultats, demande à être pratiquée sur des animaux en bonne santé et suffisamment longtemps avant pour que les bovins soient pleinement immunisés lors de l’exposition au problème. De plus, pour certaines bactéries comme les mycoplasmes, il n’existe pas de vaccin disponible.

La notion de « broutard préparé » commence à émerger

Pour limiter les risques liés aux pathologies respiratoires, cela passe par une vraie préparation à la commercialisation par le vendeur. La vaccination pour les principaux virus et bactéries constitue une première étape nécessaire. Pour le naisseur, elle sera d’autant plus bénéfique qu’il la commence jeune, en profitant pendant toute la période des veaux sur la ferme et n’ayant qu’un rappel à faire avant le départ des animaux. Les engraisseurs et donc les opérateurs commerciaux sont aujourd’hui partants pour rémunérer cette prévention dans le cadre d’accords contractuels (cf. encadré « Le broutard préparé, un ensemble de mesures à mettre en place »).

 

 

Des expériences déjà menées sur le terrain

Depuis 2006, les opérateurs commerciaux proposent des dispositifs. Les difficultés sont nombreuses : valorisation économique jugée insuffisante, difficulté de la traçabilité de la garantie des broutards et de la structuration d’une filière complète, recours aux antibiotiques encore efficaces. Les évolutions sur l’usage des antibiotiques et la concurrence de « broutards préparés » venant d’autres pays vont participer à lever ces freins. L’expérience de pays comme les Etats-Unis permet de constater l’efficacité des mesures mises en place. C’est l’esprit de la démarche Interbev qui va proposer un cahier des charges harmonisé et une traçabilité des animaux préparés avec une valorisation économique et une réponse aux enjeux sanitaires, animaux et humains (cf. encadré « Préparation sanitaire des broutards, Interbev se mobilise »).

Une nécessaire concertation de tous les acteurs du marché

Le déploiement de ces mesures passe par une prise de conscience du naisseur sur l’intérêt de la préparation, une juste rémunération de son travail et une bonne traçabilité pour sécuriser l’engraisseur final. Dans le cadre de notre concept « Le sanitaire… j’adhère ! », GDS Creuse, conscient des enjeux de cette problématique, a engagé une réflexion commune avec les opérateurs commerciaux exerçant en Creuse et Interbev. Il se tiendra aux côtés des acteurs de cette mutation en appui technique et relai de communication. Pour tout renseignement complémentaire, n’hésitez pas à nous contacter.

Dr Boris BOUBET
GDS Creuse

 

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