Babésiose ou piroplasmose bovine – 16 mai 2014

Babésiose ou piroplasmose bovine
Une maladie de printemps qui colonise de nouveaux territoires

Piroplasmose bovine => Ces dernières années, les conditions climatiques hivernales favorables ont permis un développement important des tiques, agent de transmission de la piroplasmose. Cela entraîne des modifications dans l’épidémiologie de cette maladie.

La babésiose ou piroplasmose bovine est une grave maladie parasitaire des bovins adultes due à un protozoaire, petit parasite microscopique qui vit dans le sang des animaux atteints. Sa multiplication dans les globules rouges provoque leur éclatement, les parasites ainsi libérés vont parasiter d’autres globules et les faire éclater à nouveau. Tous les troubles observés découlent de ces phénomènes.

Une maladie spécifique transmise par des tiques

La piroplasmose est une maladie spécifique, c’est à dire qu’un piroplasme de bovin ne peut être transmis qu’à un bovin (de même pour la piroplasmose canine). La source essentielle de contamination d’un bovin est un bovin porteur. La piroplasmose bovine n’est donc pas transmissible à l’espèce canine ni à l’espèce humaine. Ce sont les tiques qui transmettent la maladie. Elles vivent dans les broussailles, les haies ou les landes. La femelle pond des œufs qui donnent naissance à des larves. La larve cherche un hôte pour prendre un repas de sang. Une fois gorgée, elle tombe sur le sol où elle va se transformer en nymphe. Celle-ci recherche à son tour un hôte et se gorge de sang, une fois repue elle tombe sur le sol et se transforme en adulte. Celui-ci se fixe sur un hôte, se gave de sang, tombe sur le sol où il se reproduit. Le cycle est bouclé en trois ans (cf. article du 09/05/2014). Toutes les tiques ne sont pas porteuses de piroplasmes. Par contre, lorsqu’une tique porteuse pique un bovin, elle le contamine. Historiquement, il existe des « prés à piroplasmose » que l’éleveur connaît bien dans son exploitation. Cependant, les modifications climatiques, les circulations de bovins, l’agrandissement des structures entraînent des extensions des zones présentant des tiques porteuses de piroplasmes.

Une maladie saisonnière mais qui peut apparaître à tout moment

La maladie est saisonnière : printemps et automne, saisons favorables au développement des tiques, mais une piroplasmose maladive peut apparaître à tout moment. Les dates d’apparition de la maladie dépendant des aléas climatiques : dès le mois de mars, lors d’hivers doux et de printemps précoces, la vigilance doit redoubler pendant les mois de mai à juin. L’éleveur doit alors essayer de voir dans sa pâture chaque bovin uriner au moins une fois par jour : ce n’est pas facile !

Une attention étroite nécessaire pour observer les symptômes

Le seul signe caractéristique chez les bovins est le « pissement de sang ». Il s’agit de l’émission d’urines foncées (rouges à noires) et mousseuses. D’autres symptômes peuvent faire suspecter la piroplasmose mais ils ne sont pas constants ou caractéristiques. Au début de la maladie, le rétrécissement de l’anus entraîne l’émission de matières fécales par jets fins de la grosseur d’un doigt, projetés loin derrière l’animal. Il s’agit d’un signe caractéristique, mais inconstant. La température dépasse souvent 40°C. Chez les laitières, la diminution brutale de la production laitière alerte un éleveur averti. Lorsque la maladie a évolué quelques jours, on note une baisse ou un arrêt de l’appétit, parfois de la prostration et de la constipation, un changement de couleur des muqueuses qui blanchissent d’abord pour virer au jaune ensuite.

Le « pissement de sang » qui correspond à l'émission d'urines foncées (rouges à noires) et mousseuses et le rétrécissement de l'anus qui entraîne l'émission de matières fécales par jets fins de la grosseur d'un doigt, projetés loin derrière l'animal constituent des signes caractéristiques de la babésiose ou piroplasmose bovine. La difficulté à les observer ou la non-présence systématique demandent une observation quotidienne attentive des bovins adultes dans les zones et périodes à risques.

Un traitement précoce nécessaire

Le traitement doit être précoce pour être efficace et éviter que la maladie ne laisse des séquelles (hépatorénales notamment). L’Imidocarbe (Carbésia®) est utilisé pour détruire les piroplasmes. Si la maladie a été détectée tardivement, un traitement complémentaire devra être mis en œuvre en fonction de l’état de l’animal pour compenser l’anémie due à la destruction des globules rouges et soutenir les fonctions hépatiques et rénales. Les résultats sont alors très inconstants quelle que soit la thérapie mise en place.

Une prévention basée sur la prémunition immunitaire et la chimiothérapie

Dans un milieu contaminé, les bovins qui sont toujours en contact avec des tiques porteuses de piroplasmes développent une immunité transmise aux descendants. Cette prémunition est entretenue au cours des années par les contaminations successives. Ainsi, la maladie n’est présente dans l’exploitation que lors d’introduction d’animaux non-prémunis ou sur un animal prémuni affaibli à la suite de maladie ou de stress qui ont entraîné la diminution des défenses de l’organisme. La première prévention consiste donc à éviter de mettre des animaux sensibles dans les pâtures à risque en période dangereuse. Il n’est en effet pas pensable de détruire les tiques dans le milieu extérieur. Il est possible d’agir sur les tiques en empêchant leur fixation sur les bovins avec des acaricides qui tuent également les tiques déjà fixées. La fréquence des traitements est fonction de la rémanence des produits choisis. La chimioprévention (Carbésia® 2,5 mg/kg – délai d’attente viande 213 jours et délai d’attente lait 6 jours), puis la mise en contact des animaux avec les des tiques infectées permet la mise en place de l’immunité concomitante. Il est évident que dans ce cas, il ne sera pas utiliser d’acaricides empêchant les tiques de se fixer sur l’animal.

Dans les zones infectées ou lors de pratique de chimioprévention avec Carbésia®, on espère que le bovin sera en contact avec des piroplasmes afin de conserver ou développer une immunité contre les piroplasmes. Evidemment, dans ces cas, il ne sera pas utilisé d'acaricides qui empêcherait les tiques de se fixer sur l'animal.

Une maladie avec une épidémiologie parfois difficile à suivre

Deux situations épidémiologiques peuvent s’observer : un risque clinique faible (stabilité enzootique) lorsque le parasite circule peu ou au contraire beaucoup et un risque élevé de maladie (instabilité enzootique) lorsque la circulation relativement importante du piroplasme ne permet cependant pas l’installation de l’immunité chez assez d’animaux. En milieu sain, les animaux venant d’un milieu contaminé seront traités lors de leur introduction. Le cas le plus difficile est celui du milieu moyennement infecté de tiques porteuses de piroplasmes avec des cas sporadiques réguliers de piroplasmose. Le traitement des tiques sur l’animal peut alors être recommandé. Cette situation peut s’observer lors d’extension de zones présentant des tiques contaminées où l’on voit apparaître des cas cliniques.

En conclusion, une action à adapter en fonction du contexte

Dans les élevages en « stabilité enzootique », l’accent est à mettre sur le maintien de l’équilibre et la protection des animaux nouvellement introduits (chimio-immunisation), pas de stress…). Dans les élevages en « instabilité enzootique », la priorité est l’immunisation du pré-troupeau (pâtures à risques). Face à une émergence clinique de babésiose ou piroplasmose bovine dans une exploitation ou une zone précédemment indemnes ou en « stabilité enzootique », une enquête épidémiologique avec son vétérinaire est nécessaire pour déterminer les causes possibles et mettre en place les mesures de prévention adaptées.

Dr Didier GUERIN – GDS Creuse

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